Critique garantie sans spoilers de la saison 1 de Watchmen, diffusée en 2019.
Avec Regina King, Tim Blake Nelson, Jean Smart, Hong Chau, Jeremy Irons, Yahya Abdul-Mateen II, Tom Mison, Sara Vickers et Louis Gossett Jr.
Dans le monde uchronique de Watchmen, Tulsa, Oklahoma, 2019. Trois ans auparavant, un groupe de suprématistes blancs appelés « La 7e Kavalerie », se revendiquant successeur de Rorschach, s’est attaqué à tous les policiers de la ville ainsi qu’à leurs familles. Afin de protéger leur identité depuis cette attaque poétiquement surnommée « La Nuit Blanche », les policiers de l’État ont désormais l’autorisation de se masquer avec un bandana jaune afin de conserver leur anonymat. Profondément marqués par cette nuit tragique, Angela Abar et le chef de la police de Tulsa, Judd Crawford, décident d’enquêter de concert sur ce groupuscule et ses adeptes.
Adapter un univers
Watchmen n’est pas à proprement parler une adaptation du comic book d’Alan Moore et Dave Gibbons : on ne retrouve en effet pas les événements de la BD d’origine, mais par contre la série se déroule dans le même univers quelques décennies plus tard. Les événements ayant eu lieu dans le comic book sont donc bien considérés comme ayant eu lieu avant la série, la série ne faisant pas les mêmes choix que ceux opérés pour le film de Zack Snyder sorti en 2009.
C’est donc tout un univers que Damon Lindelof et son équipe ont adapté, car on retrouve le cadre uchronique familier des spectateurs/lecteurs de Watchmen : Nixon a bien gagné la guerre du Vietnam en utilisant le Dr Manhattan, les justiciers ont fait leur apparition avec Hooded Justice puis les Minutemen, le monde a bien été sauvé de l’apocalypse nucléaire par les agissements d’Ozymandias, … et on retrouve donc certains personnages, qui ont pris un petit coup de vieux au passage.
Conserver l’esprit
Comic book majeur des années 1980, Watchmen va plus loin qu’une simple histoire de super-héros. L’oeuvre d’Alan Moore est en effet très politique, et offre également une réflexion sur les coulisses pas forcément reluisantes du super-héros / justicier.
La série télévisée est parfaitement dans l’esprit du travail d’Alan Moore, avec un discours politique marqué et une narration marquée par des histoires en parallèle qui se font écho. On retrouve même une analogie avec les fameuses histoires de pirates présentes dans les comics, ainsi que différents niveaux de lecture de la série.
Représenter un univers
Watchmen étant redoutablement bien écrite, on se doute qu’il fallait un casting à la hauteur pour rendre justice au scénario. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le casting est un sans faute : Regina King est impeccable, tout comme ses collègues dont un très surprenant Tim Blake Nelson qui fait ainsi totalement oublier sa prestation de flic neuneu dans Unbreakable Kimmy Schmitt. Et bien sûr Jean Smart apporte une touche supplémentaire à l’excellence du casting avec son talent habituel.
On pourra aussi apprécier la présence de Jeremy Irons qui est tout simplement parfait dans son rôle. Nous avons aussi le plaisir de retrouver Louis Gossett Jr au casting, dans un rôle qui s’avère surprenant au fil des épisodes.
Enfin sur le plan visuel, nous avons aussi droit à une saison de qualité. La réalisation est impeccable, avec une foultitude de petits détails pour le téléspectateur attentif. Quant aux effets visuels, ils sont soignés : on sent qu’on est pas dans une série CW au budget rikiki, Watchmen se donne les moyens de ses ambitions et ça fonctionne très bien à l’écran.
Aller plus loin
Contrairement à Zack Snyder – qui a globalement décalqué la trame et le visuel du comic book pour son film – Damon Lindelof ne s’est pas contenté de recopier sagement le travail d’Alan Moore et Dave Gibbons. Il y a en effet une volonté de s’approprier le matériel d’origine en le complétant, tout en conservant sa pertinence. L’exemple le plus frappant est la décision de révéler l’identité de Hooded Justice, qu’Alan Moore avait soigneusement conservée secrète. Le choix qui a été fait est à la fois audacieux, très surprenant et d’une logique implacable, et constitue une des plus grandes surprises de cette saison qui d’ailleurs n’en manque pas !
Il y a également des choses qui vont plus loin que le matériel d’origine, comme le devenir de certains personnages entre l’histoire de la BD et la série, puis au cours de la saison. Là aussi on sort du cadre de l’adaptation sagement fidèle, tout en conservant l’esprit de l’oeuvre d’origine. Les nouveaux personnages sont également bien écrits, et ont une véritable importance : il ne s’agit pas en effet pour eux de servir les plats aux personnages issus du récit original, Watchmen est leur série et ils en sont la véritable clef de voûte.
En conclusion
La première saison de Watchmen était attendue au tournant, et tient toutes ses promesses en étant très bien écrite et réalisée. On retrouve l’esprit de l’oeuvre d’Alan Moore et Dave Gibbons, qui se retrouve complétée avec beaucoup de respect et d’intelligence.
Derniers commentaires