Le lundi c’est librairie ! vous propose aujourd’hui la chronique d’un album édité par Panini Comics.
Au programme : X-Men – Les Nouveaux mutants par Claremont / Sienkiewicz
X-Men – Les Nouveaux mutants par Claremont / Sienkiewicz | |
Panini Comics 520 pages – 36€ Chris Claremont |
Les Nouveaux Mutants aident leur amie Danielle Moonstar à combattre celui qui a tué ses parents : l’Ours Démon. L’équipe découvre ensuite l’existence du fils de Charles Xavier : David Haller, le mutant schizophrène connu sous le nom de Légion. Dans les années 80, en parallèle du succès de la série Uncanny X-Men, Marvel confie à Chris Claremont la tâche d’écrire un spin-off. Le succès de la série est immédiat et elle devient culte à l’arrivée de Bill Sienkiewicz au dessin. Ces épisodes, censurés lors de leur publication, sont publiés pour la première fois dans leur intégralité en France.
(Contient les épisodes US New Mutants (1983) 18-38, publiés précédemment dans les revues X-MEN CLASSIC 3 et (certains épisodes étant censurés de plusieurs pages) dans TITANS 80-85, 101-104 et 10 inédits)
Au cours de la publication des aventures de la série Les Nouveaux mutants en France, les récits consacrés aux jeunes successeurs des X-Men ont eu à affronter un ennemi redoutable : la censure. Il faut dire que Lug, qui éditait les revues où étaient publiées leurs aventures (un album puis la revue Titans), était particulièrement attentif à ce qui était publié dans ses pages pour éviter de connaître à nouveau des ennuis avec les autorités si le contenu était de nature à choquer les jeunes lecteurs. Du coup, se retrouvant face à une période particulièrement sombre de la série flirtant allègrement avec le cauchemar et l’horreur, l’éditeur n’y est pas allé de main morte et a sorti tout son attirail : dessins retouchés, planches recomposées ou supprimées, épisodes sautés… Avec ce volume, nous avons droit aux épisodes en question dans leur version d’origine, avec même des contenus totalement inédits qui permettent enfin de comprendre ce à quoi il était fait vaguement allusion il y a une trentaine d’années.
Chris Claremont entraine donc ses jeunes mutants dans des directions où on ne l’attendait pas. Episodes d’horreur ou de cauchemar comme je le disais plus haut, avec un combat contre une créature démoniaque, une rencontre avec un extra-terrestre au physique totalement surprenant… les sujets traités sont nombreux et bien moins sages que ce qu’il avait écrit jusque là. Certains épisodes reviennent même sur l’univers du Graphic Novel de sa collègue Ann Nocenti (avec laquelle il a pas mal de points communs dans son écriture d’ailleurs) où Dazzler s retrouvait enrôlée dans un univers de gladiateurs mutants. C’est aussi l’occasion de faire la connaissance de Legion (le fils caché du Professeur Xavier), mais également de comprendre ce qu’il est arrivé à Karma (enfin dans un monde où Marvel World est à portée de clic, je doute qu’il reste beaucoup de lecteurs de l’époque qui ne connaissent pas le fin mot de l’histoire).
Ces épisodes sont en tout cas très intéressants et n’ont rien perdu de leur caractère percutant avec le passage des années. Certes, c’est du Claremont donc c’est très bavard mais ça passe plutôt bien. Il y a une légère baisse de régime avec justement la partie sur les gladiateurs dont je parlais plus haut, mais rien de méchant et ça repart ensuite de plus belle. Les différentes histoires évoquent des thématiques super-héroïques, mais parlent également des préoccupations des adolescents avec justesse. Et bien entendu, on retrouve un discours sur la différence, ce qui fait partie de l’ADN des séries X-Men depuis les tous premiers épisodes.
C’est également un plus non négligeable de pouvoir lire ces histoires sans le charcutage de Lug, car à l’époque bien malin celui qui aura compris d’où nous étaient parachutés Tom Corsi et Sharon Friedlander par exemple. Certaines histoires prennent une toute autre dimension avec l’intégralité de leurs pages et surtout quand les pages en question sont dans l’ordre ! L’arc sur Legion est à mon avis le plus réussi de l’album, exploitant à merveille le contexte où il se déroule (je ne peux pas en dire plus pour ne pas faire de spoiler) dans une ambiance quasi onirique où le lecteur se retrouve pris dans une sorte de rêve éveillé. D’ailleurs, si vous avez apprécié la première saison de la série télévisée Legion, on retrouve dans cet album des éléments qui ont servi à la construire (et pas que dans l’arc consacré au personnage d’ailleurs).
Par contre, cet album souffre d’un petit défaut : une absence quasi totale de contenu éditorial. En effet, en dehors du texte de présentation qui ouvre l’album, il n’y a pas la moindre ligne. Certes, ce n’est pas une anthologie mais tout de même il y a deux passages un peu raides quand on ne connait pas cet univers sur le bout des doigts, vu qu’il manque deux périodes (dont une toujours inédite en France devait être publiée dans l’anthologie qui a été repoussée à l’année prochaine). C’est dommage, car la seconde ellipse (correspondant au passage des Nouveaux mutants sur Asgard) aurait mérité peut être un petit peu d’explications pour que les lecteurs sachent de quoi il retourne.
Contrairement à ce que laisse entendre le titre de l’album, Bill Sienkiewicz n’est pas le seul maître d’oeuvre du graphisme de ce livre mais nous allons commencer par parler de sa partie. Son style tranchait radicalement avec les canons de l’époque, entrainant le lecteur dans une ambiance très particulière. On est très loin du classicisme de Bob McLeod et Sal Buscema – ses prédécesseurs – avec une approche nettement plus abstraite et viscérale du graphisme. La mise en page est également beaucoup plus travaillée, plus déstructurée que sous les crayons de ses collègues. Plusieurs décennies plus tard, le trait de Bill Sienkiewicz n’a rien perdu de sa force et son style est toujours aussi efficace. C’est également un grand plaisir de le découvrir en version intégrale, sans la censure de Lug qui avait assagi certains dessins et recomposé certaines planches.
On passe ensuite à Steve Leiahola, et là par contre… c’est nettement moins bon. Ca reste tout de même loin d’être mauvais, mais forcément l’artiste souffre de la comparaison avec son prédécesseur, de surcroit dans un album où les épisodes s’enchaînent. On retrouve un souci de dépeindre des ambiances cauchemardesques, mais avec beaucoup moins d’efficacité que dans les épisodes précédents.
Enfin on termine avec Mary Wilshire, qui se trouve quant à elle entre les deux artistes précédents en ce qui concerne la qualité du dessin. Ses planches sont en effet plus réussies que celles de Steve Leiahola mais toujours un cran en dessous de celles de Bill Sienkiewicz (le cran est du coup moins prononcé).
Un excellent album, au contenu qui a de quoi ravir plus d’un lecteur de longue date des Nouveaux mutants.
C’est tout pour aujourd’hui !
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