Le lundi c’est librairie !
Au programme cette semaine, deux albums édités par Delcourt Comics : Undiscovered Country et Moby Dick.
Undiscovered Country Tome 1 | ||
Delcourt Comics 192 pages – 17.50€ Charles Soule / Scott Snyder |
Les droits cinéma de cette nouvelle série signée Scott Snyder (Batman), Charles Soule (Daredevil, Dark Vador) et Giuseppe Camuncoli (Star Wars; Spider-Man, Green Valley) ont été acquis par New Republic Pictures. Les USA sont devenues une terre mystérieuse et surtout dangereuse après s’être armée puis fermée au reste du monde, sans aucune explication, il y a plus de trente ans. Lorsqu’une équipe à la recherche d’un remède contre une pandémie mondiale franchit les frontières américaines, elle se retrouve rapidement acculée afin de lutter pour sa survie sur ce continent dorénavant perdu, étrange et mortel !
Nous vous en avions parlé à l’occasion du concours que nous avions organisé, maintenant il est temps de livrer notre avis sur le tome 1 de Undiscovered Country.
Scott Snyder et Charles Soule unissent leur efforts pour partir d’un concept faussement simple : les USA se sont isolés pendant des années et autorisent une équipe internationale à revenir sur leur territoire. Ca l’air anodin comme ça, mais en fait le concept est très réfléchi et s’avère beaucoup plus complexe qu’il n’en a l’air. Ironie du sort, l’histoire est tristement d’actualité vu qu’il est question d’une pandémie quoique celle-ci s’avère encore pire que celle que nous vivons depuis bientôt un an…
Le travail conjoint de Scott Snyder et Charles Soule fait que l’on reconnait ici et là les traces caractéristiques de leurs styles respectifs. L’union fait la force comme on dit, et le duo d’auteurs livre une oeuvre à la fois passionnante et glaçante, pleine de rebondissements et de mystères. Au début de l’album, on est un peu perdus mais au fil des pages on apprend à mieux connaitre les personnages et leurs motivations grâce à une caractérisation efficace.
Ce premier tome pose les bases d’un univers passionnant, où véritablement tout peut arriver et où les USA semblent être carrément devenus un monde à part, comme si au lieu d’avoir « juste » passé une barrière les personnages avaient en fait carrément changé de planète. En l’espèce, c’est une nouvelle découverte du continent américain qui nous est proposé avec l’équipe internationale en nouveaux explorateurs façon Christophe Colomb.
Ce premier album de Undiscovered Country est vraiment original, exploitant à merveille son concept et ses idées bien pensées (même si l’une d’entre elles, si elle est avérée, évoque un vieil épisode des Quatre Fantastiques). On sent vraiment que les auteurs ont encore plus d’un tour dans leur sac, et que nous sommes loin d’être au bout de nos surprises avec cette série prévue en cinq tomes.
La partie graphique de l’album est quant à elle assurée par Guiseppe Camuncoli, qui signe des planches de toute beauté. Qu’il s’agisse de représenter un cadre « normal » ou les paysages et créatures vraiment étranges de cette nouvelle version de l’Amérique, l’artiste est très à l’aise et livre des dessins très réussis qui mettent parfaitement le scénario en images.
Le défi était pourtant de taille, car vu le sujet de l’histoire il aurait été trop simple de se contenter de représenter une société qui serait juste un petit peu différente de ce que l’on connait. Ici, Guiseppe Camuncoli n’y va pas par quatre chemins pour représenter des choses vraiment très différentes – et spectaculairement différentes – sans pour autant partir dans le grand n’importe quoi.
Côté bonus, nous avons droit à une postface de Scott Snyder & Charles Soule détaillant leur collaboration mais aussi à une abondante galerie d’illustrations et de couvertures et à la chronologie du scellage des Etats Unis d’Amérique.
Un excellent album, qui pose avec efficacité les bases d’un univers passionnant.
Moby Dick | ||
Delcourt Comics 48 pages – 14.95€ Bill Sienkiewicz / Herman Melville / Dan Chichester |
Tout le monde – ou presque – connaît l’histoire de Moby Dick par Herman Melville. En revanche, lorsqu’un auteur de génie tel que Bill Sienkiewicz se penche sur une adaptation en BD de ce monument de la littérature. Attiré par la mer, Ismaël, le narrateur, décide de partir à la chasse à la baleine. Il embarque sur Le Pequod, commandé par le Capitaine Achab, obsédé par un cachalot blanc particulièrement féroce surnommé Moby Dick qui lui a arraché la jambe. À travers le voyage « sans retour » de son personnage principal, Melville aborde des thèmes universels, le concept de classe et de statut social.
Quand Bill Sienkiewicz s’attaque à un classique de la littérature tel que Moby Dick, on peut s’attendre à quelque chose de grand… et c’est précisément le cas.
Plutôt que de retranscrire simplement l’oeuvre de Herman Melville sous forme de BD, Bill Sienkiewicz et Dan Chichester ont digéré et intégré l’oeuvre pour la restituer en focalisant leur vision sur ses thèmes principaux : l’obsession d’un homme prêt à tout pour arriver à ses fins et les classes sociales de l’époque où se déroule le récit. Plus qu’une simple adaptation, c’est une véritable relecture du contenu de l’oeuvre sous une forme à la fois fouillée et synthétique.
L’album se lit avec une facilité déconcertante tant la narration est fluide, même si les textes sont nombreux. Certes les auteurs trichent un peu, en n’utilisant pas de bulles au profit de nombreuses cases de textes, mais cela fonctionne très bien car la mise en page très bien pensée permet à cette représentation de l’oeuvre de bénéficier d’une lecture naturelle et aisée.
Quant à l’oeuvre d’origine elle-même, ainsi sublimée par le superbe travail de Bill Sienkiewicz et Dan Chichester, elle reste intemporelle et n’a rien perdu de sa force. L’obsession d’Achab, force motrice du récit, fait toujours autant froid dans le dos tandis que le témoignage historique sur la société de l’époque est intéressant. Passionnant d’un bout à l’autre, Moby Dick est assurément un album qui veut le détour !
Du côté du graphisme, c’est du Bill Sienkiewicz pourrait-on se contenter de dire… Bon, c’est un peu court même si les lecteurs connaissant le travail de l’artiste doivent avoir une idée de ce que je veux dire par là. En fait, cet album est totalement imprégné du style de Bill Sienkiewicz qui fait de chaque titre une véritable expérience faisant osciller le lecteur entre lecture et rêverie.
L’artiste livre donc une prestation sublime, mélangeant plusieurs techniques pour donner un résultat époustouflant à chaque case. Plus qu’illustrer l’histoire, Bill Sienkiewicz nous la fait réellement ressentir avec son style qui n’appartient qu’à lui. Pour une oeuvre publiée en 1990, non seulement cette version de Moby Dick n’a pas pris une ride mais elle s’avère particulièrement en avance sur son temps.
On notera d’ailleurs au passage que l’artiste est dans une démarche d’hommage très respectueuse, comme en témoigne un dessin qui représente une scène du film Moby Dick avec Gregory Peck. En tout cas, le graphisme de l’album peut vous prendre de court si vous recherchez un dessin plus académique, mais pour peu que vous appréciez le style de Bill Sienkiewicz et un graphisme plus expérimental et onirique, cet album est fait pour vous !
Un excellent album, qui entraine le lecteur dans une expérience quasi-onirique pour lui faire ressentir la puissance de l’oeuvre de Herman Melville.
C’est tout pour aujourd’hui !
Le lundi c’est librairie ! vous donne rendez-vous lundi prochain pour une nouvelle chronique.
Le programme de lundi prochain sera consacré à plusieurs albums, à lundi prochain ! 🙂
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