Le lundi c’est librairie ! vous propose aujourd’hui la chronique de quatre albums, édités par Delcourt Comics, Urban Comics et Mana Books.
Au programme : Hellboy & BPRD t4, Les chroniques de Chrorum t1, I hate Fairyland t4 et Hitman – La naissance de l’Agent 47 (en avant-première).
Hellboy & BPRD tome 4 | |
Delcourt Comics 160 pages – 15.95€ Mike Mignola / Chris Roberson |
1955. Hellboy rencontre des prédateurs invisibles, des cas de combustion spontanée et une arme étrange située au cœur d’une base de l’Air Force qui est en réalité bien plus qu’elle ne paraît. Le démon cornu poursuit son apprentissage au sein du B.P.R.D. en accomplissant ces premières missions qui vont forger l’enquêteur du paranormal hors-pair qu’il deviendra par la suite.
Avec ce nouvel album, Mike Mignola et Chris Roberson enrichissent à nouveau l’univers de Hellboy en revenant sur le passé du personnage avec le BPRD.
Trois chapitres sont au programme de ce tome, situés dans les années 1950. Petit à petit, on voit Hellboy prendre de l’assurance pour devenir le personnage que l’on a connu ensuite dans ses aventures classiques. Reprenant l’efficace stratégie du « freak of the week », consistant donc à multiplier les créatures étranges, chaque histoire permet de voir comment Hellboy est progressivement devenu ce personnage imposant et particulièrement efficace dans le domaine du paranormal.
Une chose qui est particulièrement impressionnante dans cette série est l’énergie et le talent déployés pour revenir sur le passé de Hellboy (et donc de faire poindre ici et là des choses qui ont eu leur importance dans des récits se situant dans des périodes postérieures) sans que cela ne sente à aucun moment le réchauffé. Il aurait en effet été facile de rallonger la sauce pour continuer à servir du Hellboy au kilomètre en brodant sur des choses vues et revues, mais ce piège est constamment évité. C’est vraiment intéressant d’assister à l’évolution de Hellboy histoire après histoire, et de trouver à chaque fois les détails qui expliquent des attitudes ou des événements que les lecteurs de ses aventures ont pu remarquer dans un album ou un autre.
En ce qui concerne le dessin, les artistes à l’oeuvre rivalisent de talent pour nous offrir des planches superbement réalisées. On retrouve bien cette ambiance sombre matinée d’horreur qui colle très bien à Hellboy. Les styles des illustrateurs sont suffisamment différents pour qu’on ressente le changement de l’un à l’autre, mais il y a un grand souci de cohérence dans leur travail pour conserver une certaine identité graphique qui est la marque des aventures de Hellboy et du BPRD.
Côté bonus, la brièveté de la partie BD est fort heureusement compensée par des contenus très intéressants. Le sketchbook commenté par les différents artistes permet de voir leur méthodes de travail, et ce d’une façon très détaillée. C’est toujours intéressant de voir comment les artistes travaillent, en nous invitant au cœur du processus créatif.
Un excellent album, qui est juste un peu court.
Les chroniques de Corum tome 1 | |
Delcourt Comics 128 pages – 15.95€ Mike Baron / Michael Moorcock |
Le Prince Corum Jhaelen Irsei, surnommé le Prince à la robe écarlate, nous entraîne dans un voyage épique et fantastique à travers les quinze plans d’existence de la Terre, au coeur même du temps. Héros malgré lui, il est l’une des nombreuses incarnations du « Champion Éternel » et doit affronter les terribles Dieux du Chaos afin de sauver le monde, mais aussi la femme qu’il aime.
En provenance de la fin des années 1980, voici l’adaptation d’une oeuvre de Michael Moorcock sous forme de comic book.
Mike Baron relève donc le difficile défi de passer du roman à la bande dessinée, et donc de faire passer les aventures du prince Corum dans un autre style de narration. Je ne suis pas lecteur de Michael Moorcock, donc je ne pourrai pas juger de la qualité de l’adaptation, mais j’ai déjà lu quelques adaptations de romans en BD et j’en connais les travers. Fort heureusement, il n’y en a pas trace ici.
Il n’y a en effet pas de trop longs pavés récitatifs reprenant des passages du roman (même si l’auteur est bien bavard, nous sommes encore dans les standards de narration d’une époque où c’était assez courant) et l’histoire ne donne pas non plus l’impression d’avoir été charcutée pour en livrer une version abrégée. A aucun moment donc nous ne sommes largués ou au contraire noyés sous les détails.
C’est une ambiance de fantasy qui est au programme de ce premier tome, où nous faisons connaissance avec le prince Corum tandis que nous le suivons au cours de ses aventures. L’auteur n’a pas lésiné sur les mésaventures qui lui tombent dessus, à tel point qu’on se demande jusqu’où ça va aller !
L’histoire est en tout cas plaisante à lire, malgré des moments très glauques, et on ne s’ennuie pas en suivant le Prince à la robe écarlate de page en page. L’univers décrit dans cet album est par ailleurs bien fichu, avec une description efficace pour le lecteur totalement néophyte sans qu’il ne soit besoin d’être un expert en fantasy ou de l’oeuvre de l’auteur.
Côté graphisme, nous avons droit au travail de Mike Mignola dans un style où on ne reconnait pas encore le futur dessinateur de Hellboy. C’est assez surprenant, mais c’est plutôt joliment exécuté. La colorisation par contre est un peu datée, rien d’insurmontable mais ça donne un côté pastel qui fait un peu bizarre de nos jours (un peu comme la colorisation d’origine de Rocketeer pour vous donner une idée). A noter que le choix du papier mat est particulièrement judicieux, car le trait et les couleurs ne sont ainsi pas du tout dénaturés.
Un très bon album, qui emmène le lecteur dans un intéressant voyage dans un univers de fantasy.
I hate Fairyland tome 4 | |
Urban Comics 168 pages – 15.5€ Skottie Young |
Après avoir instauré un règne de terreur à Fairyland pendant de si longues années, Gert a subitement pris la décision de changer de mode de vie et de devenir quelqu’un de bien. Un moyen, peut-être, d’effacer ses dettes karmiques et d’enfin rentrer chez elle. Sur le point de toucher au but, il n’aura suffi que d’un malheureux accident de sucette pour anéantir tous ses espoirs et finir six pieds sous terre, dans le royaume des Enfers dirigé par son ennemie jurée : Happy !
Contenu VO : I Hate Fairyland #16-20 + FCBD new edition
Toutes les bonnes choses ont une fin, et maintenant c’est au tour de Gertrude de nous dire au revoir à sa façon.
Après un troisième album qui nous avait laissés sans voix, voilà que Skottie Young joue à nouveau avec les nerfs des lecteurs. A l’image de sa furie aux cheveux verts, il ne s’est pas calmé et s’amuse beaucoup à jouer avec les codes qu’il casse une dernière fois pour conclure sa série. On pouvait se demander comment l’auteur allait se dépatouiller après la conclusion du troisième tome, mais il ne fallait pas le sous-estimer car il a de l’astuce à revendre !
Histoire de ranger proprement ses jouets, Skottie Young revient sur des événements et des personnages de la série. Cela a un petit côté nostalgique pas désagréable, un peu comme lorsque les acteurs reviennent pour la dernière saison d’une série télévisée. Ce dernier tome est en tout cas tout aussi efficace que les précédents : c’est bête et méchant, avec une bonne dose d’humour noir et une grande inventivité dans le détournement des gros mots.
Il va sans dire que si jusque là vous avez aimé ce gros délire qu’est I hate Fairyland, ce dernier opus ne vous décevra pas. On retrouve cette ambiance de cartoon survoltée sous acide, avec des moments vraiment très drôles livrés par un auteur qui va très loin dans le délire. Quant à la fin, elle est… disons particulière mais en ce qui me concerne je la trouve très bien pensée.
Côté dessin, Skottie Young est toujours en mode « cartoon barré » : ça part toujours en live d’une case à l’autre et chaque dessin sent la folie furieuse, mais avec toujours une grande maîtrise – à l’image du scénario – qui permet de distinguer une histoire barré d’un grand n’importe quoi sans queue ni tête.
Le sommaire de l’album est complété par un bonus particulièrement déjanté : il s’agit du délirant I hate Image, offert lors d’une édition du FCBD, mais en version augmentée où l’auteur s’est amusé à jouer avec les réactions (réelles ou imaginaires, qui sais avec lui…) de personnes du monde des comics. C’est toujours aussi barré, et ça ferme l’album avec une touche de délire supplémentaire.
Un excellent album, qui conclut en beauté une série qui aura été drôle d’un bout à l’autre.
Hitman – La naissance de l’Agent 47 | |
Mana Books 160 pages – 15€ Christopher Sebela |
L’agent 47 est l’un des tueurs à gages les plus efficaces de la planète : discret, méthodique et sans pitié. Mais avant de travailler pour la mystérieuse I.C.A., lui et son agent de liaison Diana Burnwood ont suivi des chemins bien différents… Pour une Diana encore adolescente, tout bascule lorsque sa famille disparaît dans une explosion de voiture. Seule survivante, elle trouve refuge auprès d’une criminelle afin d’apprendre ce dont elle a besoin pour échafauder sa vengeance. De son côté, le jeune 47 cherche à fuir le mystérieux Institut qui les ont créés, lui et les autres « sujets », dans le but de produire de parfaits assassins.
Grâce à ce préquel officiel, découvrez le passé de l’Agent 47, le fameux « Hitman » de la franchise d’infiltration développée par IO Interactive ! Véritable hommage à la créativité débridée du tueur, ce récit complet vous entraînera du coeur de l’Amérique au mur de Berlin, en passant par la zone d’exclusion de Tchernobyl.
Dans cet album, Christopher Sebela fait le portrait de deux personnages bien différents mais dont les existences finissent par se rencontrer : Diana Burnwood et le mystérieux Agent 47.
Lançant chacun des deux sur la trajectoire qui l’amènera à croiser le chemin de l’autre, l’auteur semble au départ raconter deux histoires totalement disjointes. Les personnages sont en effet très différents, et si on ne sait pas qui est qui on ne voit pas forcément comment tout ceci va finir par converger. Mais le fait est que la convergence finit par arriver, sans que cela ne soit forcé.
Qu’il s’agisse en tout cas de l’histoire d’une jeune fille ivre de vengeance après la mort des siens ou de celle d’un être étrange créé pour tuer, l’auteur est à l’aise pour nous raconter ça d’une façon très intéressante et sans jamais perdre le lecteur en route. C’est intéressant et surtout même si l’album sert à la base à enrichir l’univers des jeux Hitman il n’est nul besoin de les connaître pour profiter de l’histoire. C’est un plus non négligeable, car il arrive que les produits dérivés de jeux vidéo soient hermétiques pour les lecteurs non familiers de l’univers en question.
Même si la trame de fond des deux histoires n’est pas forcément totalement originale (la vengeance, ça marche bien et depuis pas mal de temps), Christopher Sebela ne se contente pas de nous servir du réchauffer : le récit est en effet bien ficelé et revisite les classiques pour nous offrir une trame qui fonctionne très bien, et ce qu’il s’agisse de ce qui se passe autour de l’Agent 47 ou de Diana Burnwood.
En tout cas, l’album se lit vraiment très bien : qu’il s’agisse des scènes d’action, des rebondissements et de la construction de l’univers, tout est bien pensé et on ne s’ennuie pas une seconde.
Côté graphisme, c’est Jonathan Lau qui tient les crayons. L’artiste, habitué d’adaptations, restitue avec brio l’ambiance des jeux et donne vie avec efficacité aux personnages.
Un excellent album, qui permet d’en apprendre davantage sur un duo emblématique.
C’est tout pour aujourd’hui !
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