Comme annoncé la semaine dernière, Le lundi c’est librairie ! sera cette semaine consacré à la série Queen & Country. J’avais déjà brièvement parlé du premier tome il y a longtemps, mais ayant fait l’acquisition de tous les albums j’ai entrepris une relecture de la série et donc je vais cette fois en parler de façon plus approfondie.
Je vous propose donc de nous intéresser aux quatre premiers tomes de la série, édités chez Semic (tome 1) et Akileos (tomes 2 à 4).
Queen & Country t1 : Deux histoires captivantes pour faire connaissance avec le monde de Tara Chace
Cet album contient deux histoires, toutes deux scénaristes par Greg Rucka (qui a écrit la totalité de la série). Dans la première, nous faisons connaissance avec Tara Chace, agent d’une section spéciale des services secrets Britanniques. Enfin faire connaissance est un grand mot : certes il s’agit du premier épisode de la série, mais on se retrouve immédiatement au coeur de l’action avec Tara, et on fait la découverte au fur et à mesure de son univers. Un univers d’ailleurs beaucoup moins glamour que celui de James Bond. Les services secret dans le vrai monde n’ont rien de reluisant, les agents étant manipulés par leurs supérieurs tels des pions d’échec dans l’arrière-cour des gouvernements qui ne s’affrontent pas en face. Dans cette première affaire, Tara est confrontée aux conséquence d’une de ses missions, à la fois sur le plan physique (des représailles sont exercées contre elle) et psychologiques (elle ne vit pas bien ce qu’elle a fait). L’auteur livre ici sa vision particulièrement réaliste des services secrets, bien loin d’agents secrets de cinéma qui tuent impunément et sans états d’âme. De plus on peut voir que les différentes sections se tirent dans les pattes, n’hésitant pas à utiliser des pays alliés. Dans la seconde histoire, Tara continue de souffrir des conséquences de ses actes et se retrouve mise à l’écart d’une mission importante car elle se déroule sur un territoire où les femmes ne sont pas les bienvenues. C’est l’occasion de montrer que tout le travail des services secrets ne se fait pas avec un flingue dans chaque main, mais aussi dans l’ombre et en retrait, ce qui n’est pas moins important. Les deux histoires sont en tout cas passionnantes, on se familiarise assez vite avec l’organigramme du SIS et les différents personnages sont parfaitement caractérisés. Le monde de l’espionnage est dépeint comme une machine implacable qui broie les gens qui en font partie, ce qui est à mon avis plutôt réaliste. Du côté du dessin, deux artistes se succèdent (chaque arc de Queen & Country a son artiste). Le graphisme de Steve Rolston et celui de Brian Hurtt sont assez dissemblables, le second étant un peu plus classique que le premier, mais ils sont tous les deux très dynamiques et très bien adaptés au scénario qu’ils illustrent. La série démarre en trombe avec ce premier album, que je vous conseille si vous aimez l’espionnage réaliste.
Queen & Country t2 : Un scénario passionnant mais un dessin dont je ne raffole pas
Dans ce second album, nous retrouvons Tara Chace et sa section spéciale qui se retrouvent embarqués dans une traque autour du globe. Une menace énorme doit en effet être neutralisée, et les Vigies (appelées Gorilles dans le Semic Book, ça surprend au début) vont avoir fort à faire pour mener cette mission périlleuse à son terme. Dans cette nouvelle histoire de Greg Rucka, on retrouve l’ambiance glauque des coulisses de l’espionnage, où les services secrets des différents pays (SIS et CIA notamment) doivent faire des tractations pour obtenir de l’aide alors qu’il s’agit de pays alliés. Cela complique considérablement le travail des agents sur le terrain, qui ont besoin des ressources que leurs supérieurs doivent marchander pour accomplir leur mission. Comme dans le premier tome, l’auteur dépeint ses personnages de manière particulièrement détaillée, montrant qu’il ne sont pas « que des agents ». La vie privée de Tara prend d’ailleurs un tour assez inattendu, qui peut s’avérer lourd de conséquences. L’intrigue de cet album est complexe mais passionnante, on suit avec grand plaisir cette mission qui semble impossible et on se demande à chaque page ce que nous réserve la suivante. Du côté du dessin, Leandro Fernandez a un style assez particulier, qui s’avère très caricatural sur certaines planches. Personnellement je n’ai pas raffolé de ce style, qui donne par ailleurs des allures de bimbo à Tara alors que je pense que cela ne colle pas très bien à son personnage, mais au moins il y a un certain dynamisme qui rattrape le tout. D’ailleurs en parlant de dessin, j’ai trouvé que faire redessiner le « casting » en début de chaque arc illustré par un nouvel artiste est une excellente idée, cela permet d’identifier très facilement les personnages qui peuvent avoir des traits très différents d’un arc à l’autre.
Queen & Country t3 : Un peu de calme après la tempête
Pour ce troisième album, nous avons droit à une histoire assez courte qui se passe cette fois dans le monde de l’espionnage industriel. Partant d’une affaire de chantage exercé entre états, le scénario de Greg Rucka nous montre à quel point l’espionnage peut briser la vie des gens qui se retrouvent piégés dans cet univers, que ce soit en tant qu’agent ou en tant que victime. La vie privée de Tara est d’ailleurs encore une fois au cœur de l’histoire, l’auteur attachant toujours beaucoup d’importance à ses agents. Même s’il ne s’agit pas d’une histoire 100% tranquille, cet album est quand même plus calme que le précédent dont le rythme était particulièrement effréné. Le fait que Tara connaisse la victime lui permet de se poser des questions sur sa propre vie, et donc d’agir en conséquence. Du côté du graphisme, le style de Jason Alexander m’a beaucoup plu. L’artiste utilise beaucoup les jeux d’ombres pour ses dessins, et je trouve ça très réussi. Le style est également plus réaliste que dans le tome précédent, et j’aime bien la façon dont Tara est dessinée. Un très bon album en tout cas, qui confirme tout le bien que je pense de la série.
Queen & Country t4 : Un album surprenant et passionnant
Avec cet album, Greg Rucka m’a pris par surprise : alors que je pensais que ses personnages étaient plus ou moins immortels, esquivant les bombes et les balles d’un tome à l’autre, l’auteur n’a pas hésité à tuer une vigie pour montrer que ce n’est pas le cas. Le mot d’ordre est bel et bien « réalisme », donc dans le vrai monde de l’espionnage les « héros » meurent aussi. C’est également l’occasion de montrer à quel point la mort d’un collègue peut affecter les membres du SIS, et là encore tout ceci est parfaitement dépeint. Mais ce quatrième album n’est pas consacré à la mort de Vigie Trois (ce n’est pas un spoiler, c’est sur la couverture !), en fait même si sa mort affecte beaucoup les personnages elle est en fait un point assez secondaire de l’intrigue. C’est plutôt Paul Crocker (directeur des opérations) qui est au coeur de cette affaire, le personnage étant dépeint comme un homme très complexe prêt à toutes les manipulations pour arriver à ses fins (ce qui était déjà le cas dans les tomes précédents mais ici, alors qu’il affronte un fantôme de son passé, c’est encore plus marqué). Tara n’est cependant pas négligée, que ce soit vis à vis de la façon de la mort d’Ed mais aussi de son caractère entêté pour mener une mission impossible (car c’en est une) à son terme. J’ai trouvé également intéressant qu’il soit montré comment sont recrutées les Vigies, le tout sans insistance mais de façon assez précise. Du côté du dessin, le trait de Carla Speed Mc Neil est épuré mais expressif et colle parfaitement à l’ambiance de Queen & Country. Pour tout dire, ça m’a beaucoup fait penser au premier album, ce qui est un compliment vu que j’avais beaucoup aimé ce style.
Et voilà, c’est tout pour aujourd’hui !
Le thème de la prochaine chronique de Le lundi c’est librairie ! n’est pas encore décidé au moment où sont écrites ces lignes, donc nous dirons que c’est une surprise ! 🙂
Une de mes séries préféré par l’un des meilleurs éditeurs de comics français, les tomes suivant sont encore meilleurs, il ne manque plus que le dernier tome de déclassifié en VF pour avoir la série au complet en VF.
SInon Mdata sait tu si les romans qui font le lien entre certains tomes du comic sont trouvable en VF?
Et un conseil pour finir si vous avez aimé Queen and Country essayé donc Whiteout du même auteur et chez le même éditeur.
@h00ligan : Aucune idée, je ne connaissais pas ces romans. Je tâcherai de me renseigner.
Il manque donc un dernier Déclassifié ? Je croyais qu’avec les 2 on avait tout, j’espère qu’il sera bientôt édité 🙂
@mdata, oui il y a 3 déclassifié au total, mais il ne sera pas édité de suite je te mets ici la réponse de Akileos suite a ma demande de publication de ce dernier tome.
(Akileos: Bonjour, La série n’ayant malheureusement pas eu le succès mérité, nous n’envisageons pas de publier le troisième Queen & Country Déclassifié… pour le moment.)
Si tu arrives à avoir des news sur les romans, je suis très intéressé.