Critique garantie sans spoilers de la saison 3 de Jessica Jones, avec Krysten Ritter, Rachael Taylor, Eka Darville, Benjamin Walker, Sarita Choudhury, Jeremy Bobb, Tiffany Mack, Carrie-Anne Moss et Rebecca De Mornay.
Quand Jessica Jones croise le chemin d’un psychopathe très intelligent, elle doit recoller les morceaux de sa relation avec Trish Walker pour lui faire face. Mais les deux soeurs n’ont pas la même conception de l’héroïsme…
Un dernier pour la route
Avec cette troisième saison s’achèvent les aventures de Jessica Jones, mais aussi celles de ses compagnons de route des autres séries Marvel diffusées sur Netflix. La saison 3 de Jessica Jones est en effet la seule à avoir été réalisée après qu’il soit annoncé que l’univers urbain télévisé de Marvel s’arrêtait, et donc la seule à pouvoir avoir une conclusion « propre » à ses intrigues.
Cette partie du contrat est parfaitement remplie, car la série s’arrête proprement : pas d’intrigue en suspens, pas de cliffhanger jamais résolu mais une fin à la fois conclusive et ouverte. Cette dernière laisse tout de même une marge de manoeuvre « au cas où » même s’il est peut probable que les séries reviennent un jour vu que pour sa part Krysten Ritter a déjà annoncé qu’elle ne souhaitait pas revenir dans le rôle de Jessica Jones.
Du coup cette saison a comme un parfum doux-amer, un peu quand on voit une personne pour la dernière fois tout en sachant précisément que c’est la dernière fois. Mais au moins on pourra apprécier les efforts déployés pour tout boucler proprement, même si malheureusement cette saison n’est pas exempte de défauts.
Et voici… Hellcat !
Depuis le temps qu’elle est teasée, Hellcat fait enfin son apparition, même si ce nom de code ne dépasse pas le stade des titres d’épisodes ! Trish Walker a beaucoup évolué au cours de ces trois saisons et, comme il était fortement sous-entendu à la fin de la saison 2 et dans la campagne de communication de la saison 3, la soeur adoptive de Jessica Jones a maintenant des super-pouvoirs. Sur le plan visuel, pas de costume jaune avec masque de chat malgré un clin d’oeil hilarant à ce look tellement improbable à l’écran mais comme pour Luke Cage et Iron Fist il y a toujours des rappels visuels plus ou moins subtils qui y font référence.
Cette nouvelle donne concernant Trish Walker est plutôt bien ficelée, malgré quelques longueurs et facilités, et offre au personnage une place de choix dans cette saison. Rachael Taylor est toujours à l’aise dans le rôle de Trish, qui donne toujours l’impression d’être à un cheveu de perdre la raison. Il y a pas mal de choses bien trouvées concernant ce personnage, notamment les racines de son mal-être qui sont au coeur d’une peinture au vitriol d’une certaine vision de l’Amérique. On pourra constater avec plaisir que rien n’a été laissé au hasard depuis le début de la série concernant Trish, et que du coup son personnage fait partie de ceux qui ont droit à la caractérisation la plus intéressante.
La chasse aux fous… ou presque
La campagne de promotion a dévoilé l’identité du grand méchant de la saison 3, et il s’agit de Greg Sallinger alias Foolkiller dans les comics. Ce dernier se faisait un devoir de traquer et éliminer ceux qu’il jugeait fous, ce qui l’avait amené à vouloir se suicider vu qu’il avait réalisé qu’il avait lui-même un bon pet au casque.
La version télévisée de Greg Sallinger est plus sobre : pas de costume façon film de cape et d’épée ni de profession de foi visant à éliminer les fous. Il n’en reste pas moins un adversaire particulièrement retors et la source de nombreux rebondissements et retournements de situation. C’est aussi l’occasion pour ses adversaires de se poser pas mal de questions sur eux-mêmes, le Sallinger version télévision étant un adversaire nettement plus cérébral que son modèle de papier. Jeremy Bobb fait des merveilles dans le rôle de Greg Sallinger, avec une étendue de jeu qui sied très bien au caractère polymorphe de son personnage.
Du bon…
Certains interprètes marquent tellement les personnages de leur empreinte qu’ils semblent être de véritables incarnations de leurs modèles de papier. Krysten Ritter fait partie de ces interprètes, avec une interprétation de Jessica Jones impeccable de saison en saison et totalement en accord avec la création de Brian Michael Bendis. Qu’il s’agisse de son côté badass et mal embouché ou au contraire de ses aspects plus fragiles, la comédienne est toujours parfaite dans le rôle de Jessica Jones. L’évolution du personnage au cours de la série est également plutôt bien traitée, Jessica ayant fait du chemin depuis sa première apparition.
On appréciera aussi dans cette saison l’arrivée de Benjamin Walker dans le rôle d’Erik Gelden. Au début on ne sait pas trop quoi en penser, puis d’épisode en épisode le personnage s’avère plus intéressant. Je ne peux pas en dire plus pour ne pas faire de spoiler, mais en tout cas le personnage d’Erik et celui de Jessica sont vraiment très complémentaires et forment un duo détonnant.
L’intrigue générale de la saison 3 est en tout cas intéressante, avec en prime des « vrais moments de détective » de la part de Jessica. La thématique générale de cette saison fait que cette dernière est aux saisons précédentes de Jessica Jones ce que Magnum Force était à L’inspecteur Harry, et cette réflexion est plutôt bien menée.
… et du moins bon
La saison 3 de Jessica Jones souffre du même défaut que les autres séries Marvel de Netflix : elle est trop longue. L’intrigue semble en effet étirée et diluée, avec des rebondissements en pagaille pour rallonger la sauce et justifier les treize épisodes de cette saison. On n’en est pas encore aux artifices lourds de Luke Cage avec des passages musicaux qui n’ont pour vocation que de faire défiler le compteur, mais certaines ficelles sont malheureusement bien visibles. Cependant l’impression de lourdeur est fort heureusement moins forte que dans la saison 2, qui souffrait de gros problèmes de rythme.
Cette décompression joue beaucoup en défaveur des personnages secondaires de la série, notamment Jeri Hogarth et Malcom Ducasse. Les intrigues liées à la première sont en effet tellement étirées qu’elles en deviennent pénibles au point qu’on finit par se ficher de ce qui peut bien lui arriver, tandis que pour le second ses doutes sont là aussi tellement étirés qu’à force ça en devient lourd. C’est vraiment dommage, car il s’agit de personnages qui ne rentrent pas dans le moule des personnages « classiques » de fictions télévisuelles et il aurait été plus avisé de ne pas tant tirer sur la corde pour qu’ils restent intéressants.
Autre défaut, là aussi récurrent dans cet univers : les facilités scénaristiques à géométrie variable. On peut en effet tout en même temps avoir une enquête qui piétine ou qui fait des progrès de géant suivant ce qui arrange les scénaristes, avec un manque certain de cohérence concernant les moyens disponibles pour identifier les coupables de crimes.
En conclusion
Pour ce dernier tour de piste, Jessica Jones ne renoue pas avec la qualité de la saison 1 mais arrive à faire oublier la poussive saison 2. Les défauts récurrents des séries Marvel de Netflix sont toujours là, mais la série se termine plutôt bien et se paie même le luxe de boucler la boucle d’une façon très bien trouvée. Au revoir Jessica, et merci pour ces trois saisons en ta compagnie…
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